Kinuyo Tanaka,

complément d'enquête


Posté le 17.10.2022


 

Un magnifique documentaire complète la redécouverte de la cinéaste Kinuyo Tanaka, qui a eu lieu l’an passé au festival Lumière.

 

Quand Kinuyo Tanaka décida de passer à la réalisation, Kenji Mizoguchi, dont elle avait été l’interprète fétiche dans une quinzaine de films, exprima sa désapprobation. Il ne croyait pas la star capable de devenir cinéaste, elle qui avait arrêté l’école en primaire. Comme le dit joliment l’universitaire Ayako Saito dans ce passionnant documentaire sur la deuxième réalisatrice de l’histoire du cinéma japonais, Mizoguchi était féministe mais au sens où on l’entendait à l’époque : quelqu’un qui avait beaucoup d’affection pour les femmes…

 

L’histoire donna tort au cinéaste : comme l’ont découvert tour à tour le public émerveillé du festival Lumière 2021 puis les 40 000 spectateurs de la rétrospective qui parcourut la France, Kinuyo Tanaka (1910-1977) signa six films singuliers où les personnages féminins montrent enfin du caractère, loin des héroïnes souvent soumises du cinéma japonais traditionnel.

 

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Tanaka, une femme dont on parle, 2022


 

C’est au Japon que Pascal Alex-Vincent, grand spécialiste du cinéma nippon, est parti sur les traces de l’actrice-réalisatrice méconnue. Des témoignages essentiellement féminins, notamment de la conservatrice du musée Tanaka, dans sa ville natale de Shimonoseki, retracent son parcours Et l’évolution de son style : après deux films dont l’un suivant fidèlement un scénario d’Ozu (La Lune s’est levée, 1955), Tanaka tourne ce qui reste peut-être son chef-d’œuvre, Maternité éternelle (1955), récit moderne inspiré des écrits et du parcours de la poétesse Fumiko Nakajō, morte à 31 ans d’un cancer du sein. Plus tard, son cinquième film, La Nuit des Femmes (1961), s’apparente aux descriptions violentes de la jeunesse japonaise par ses contemporains, les auteurs de la Nouvelle Vague locale - Tanaka et Oshima dialoguent même par journaux interposés.

 

Riche d’une iconographie exceptionnelle, ce documentaire sensible, disponible dans le coffret des six films de Kinuyo Tanaka publié chez Carlotta (et en vente dans les boutiques du festival), s’achève de façon très émouvante : un couple âgé, l’ancienne monteuse de Kobayashi, cinéaste qui était le cousin de Tanaka, et un ancien assistant d’Oshima, prennent soin de la tombe d’une cinéaste longtemps oubliée et enfin redécouverte.

 



 

 

Aurélien Ferenczi

 


Séances :

Tanaka, une femme dont on parle de Pascal-Alex Vincent (2022, 52min)

Villa Lumière lu 17 14h30





 

 

 

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