À la fin des années 60, Annie (Christine Lahti) et Arthur Pope (Judd Hirsch) étaient de jeunes militants radicaux, engagés contre l’establishment américain. Début 1971, au plus fort de la guerre du Viêt-nam, ils organisent un attentat contre une usine de napalm. Un gardien de nuit est blessé, le couple prend la fuite. Depuis lors, ils sont en cavale, changeant tous les six mois de lieu, d’identité, d’apparence. Pour Harry (Jonas Abry), leur fils cadet, c’est l’aventure. Pour Danny (River Phoenix), l’aîné de 17 ans, cela devient invivable. Sa rencontre avec Lorna (Martha Plimpton), la fille de son professeur de musique, va tout bouleverser…
Danny est un fugitif de naissance. Mais l’héritage du passé militant de ses parents devient un fardeau pour cet adolescent qui désormais aspire à vivre dans une normalité que d’autres jeunes de son âge rêvent de quitter : une maison, une école, des copains, une petite amie, des cours de piano, le tout pour une durée de plus de six mois, sans craindre en permanence l’arrivée du FBI.
Sidney Lumet a le don pour lier destins personnels et questions de société. S’éloignant de New York, il questionne les engagements politiques des années 70 et la famille, ce qui lie les parents, activistes en lutte contre le système, et leurs enfants, qu’ils devraient laisser partir, faire leurs choix. Car leurs convictions militantes, et en particulier celles du père, ont isolé les enfants, et Danny (flamboyant River Phoenix, figure météorique du cinéma américain des années 80/90, trois ans avant My Own Private Idaho de Gus Van Sant) s’en rend désormais compte. Arthur Pope appartient pourtant bien à la famille des personnages de Lumet, ces idéalistes prêts à tout pour lutter contre un système dominant et espérer un monde meilleur.
Le cinéaste signe un film calme, sans faux suspense – l’action a eu lieu des années auparavant. Pas d’effet de manche non plus dans la scène où Annie retrouve son père : champs, contrechamps, suffisants pour émouvoir aux larmes. À bout de course est sans doute le film le plus juste sur la fin d’une époque et l’écroulement des illusions d’une génération perdue.
« Lumet filme une tragédie familiale de façon sereine, sans cris et sans colère. C'est sans doute ce qui la rend si bouleversante. Et comme, chez Lumet, la psychologie et la politique sont étroitement imbriquées, le film devient aussi un constat sur la génération de 68. “Les jeunes de cette époque se révoltèrent contre leurs "pères" idéologiques, en l'occurrence les représentants de la vieille gauche” dit le réalisateur. “Ils les mirent au rancart sans trop se soucier de leur apport... En se coupant de ces traditions, ces jeunes ont limité leur action à un seul domaine : la lutte contre la guerre du Viêt-nam. Après cela, beaucoup sont rentrés dans les rangs et ont voté pour Reagan.” Lumet a choisi de parler de ceux qui ne sont pas rentrés dans les rangs, de montrer leur fatigue et l'impasse dans laquelle ils se sont fourvoyés. Il a aussi choisi de saluer au passage ces victimes de l'Histoire. » (François Guérif, La Revue du cinéma n°443, novembre 1988)
À bout de course (Running on Empty)
États-Unis, 1988, 1h56, couleurs, format 1.85
Réalisation Sidney Lumet
Scénario Naomi Foner
Photo Gerry Fisher
Musique Tony Mottola
Montage Andrew Mondshein
Décors Philip Rosenberg
Costumes Anna Hill Johnstone
Production Griffin Dunne, Amy Robinson, Double Play, Lorimar Film Entertainment
Distributeur Warner Bros.
Interprètes Christine Lahti (Annie Pope), River Phoenix (Danny Pope), Judd Hirsch (Arthur Pope), Jonas Abry (Harry Pope), Martha Plimpton (Lorna Phillips), Ed Crowley (Mr. Phillips), L.M. Kit Carson (Gus Winant), Steven Hill (Mr. Patterson), Augusta Dabney (Mrs. Patterson), David Margulies (le docteur Jonah Reiff)
Sortie aux États-Unis 9 septembre 1988
Sortie en France 26 octobre 1988
Ce site nécessite l'utilisation d'un navigateur internet plus récent. Merci de mettre à jour votre navigateur Internet Explorer vers une version plus récente ou de télécharger Mozilla Firefox. :
http://www.mozilla.org/fr/firefox