Deux frères, Farukh (Firus Sasaliyev), 17 ans, et Azamat (Timur Tursunov), 7 ans, habitent dans une petite ville tadjike où ils sont élevés par leur grand-mère. Farukh souhaite changer de vie et décide de confier son jeune frère à leur père, médecin dans le sanatorium d'une ville éloignée. Pour le rejoindre, les deux garçons traversent en train le Tadjikistan, à travers collines et montagnes, villes et bourgades, jusqu'à la frontière de l'Afghanistan.
Réalisé à la veille de l’éclatement de l’URSS, Bratan, le frère est le premier film, poétique et tendre, et d’une grande habileté formelle, du cinéaste tadjik Bakhtyar Khudojnazarov. Si l’action est minimale, les plans, d’une belle richesse, notamment grâce à un jeu sur la profondeur de champ, fourmillent de micro événements. Et c’est ce sens aigu du détail et de l’observation qui donne au film son étonnante beauté plastique. Semblant déconnecté de tout cadre spatiotemporel, traversant des paysages désertiques et désolés, le récit donne une impression de mirage, de songe, et le voyage prend des contours magiques. Le cinéaste, afin d’être au plus proche de la réalité, n’emploie aucun acteur professionnel. Il filme sa propre petite ville natale, et s’inspire de ses souvenirs de jeunesse, notamment lorsque les jeunes garçons font passer du haschich et de l’alcool à des détenus ou quand des enfants lancent des cailloux sur le train. Un véritable train d'ailleurs, pas un décor, circulant sur une véritable ligne qui va, comme dans le film, jusqu’à la frontière de l'Afghanistan. C’est dans cette même recherche de réalisme que Bakhtyar Khudojnazarov choisit le noir & blanc, qui lui évoque plus le documentaire que la fiction, et renonce aux répétitions, laissant ainsi une grande place à l’improvisation.
« Ou alors c'est le réalisateur, Khudojnazarov, débutant tadjik […] qui sait filmer l'espace comme un grand cinéaste. C'est sûrement ça : quand le train fait halte, chaque petite scène du bord de voie est un régal. Drôle, belle, émouvante. On n’a pas envie qu’il arrive, ce train, on a envie de comprendre pourquoi ces gens dont on ne sait rien sont soudain si intéressants, si proches. Le beau noir et blanc sfumato n'a l'air ni d'une misère ni d’une coquetterie, juste l’idoine miroir des matières et des visages. » (Jean-Michel Frodon, Le Monde, 17 décembre 1993)
Bratan, le frère (Bratan)
Tadjikistan, 1990, 1h37, noir et blanc, format 1.37
Réalisation Bakhtyar Khudojnazarov
Scénario Bakhtyar Khudojnazarov, Leonid Makhkamov
Photo Georgi Dzalayev
Musique Akhmad Bakayev
Montage Tatyana Maltseva
Décors Negmat Jouraiev
Costumes A. Allabergenova
Production Soyuztelefilm, Tajikfilm
Interprètes Timur Tursunov (Azamat), Firus Sasaliyev (Faruch), I. Tabarova (la grand-mère), N. Arifova (Nelia), Allovuddin Abdullaev (Abu Perumov), N. Begmurodov (Habi, le conducteur de la locomotive), R. Kurbanov (le père)
Présentation à la Berlinale 23 février 1992
Sortie en France 15 décembre 1993
Restauration 2K supervisée par Veit Helmer et réalisée au Cinegrell Berlin.
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