La Barrière

Invités du festival : Jerzy Skolimowski / Trésors et curiosités

Sur un coup de tête, un jeune homme laisse tout tomber pour partir à la conquête du monde. Le choc des générations dans la Pologne des années 60, à travers les méandres capricieux des amours d’une jeune conductrice de tramway et d’un étudiant en médecine en rupture avec l’Université.

Cinéaste majeur du Nouveau Cinéma polonais des années 60, Jerzy Skolimowski est sommé par les autorités polonaises de ne plus interpréter ni mettre en scène le personnage d’Andrzej Leszczy, alter ego du cinéaste, présent dans Signe particulier : néant (1965) et Walkower (1965) : il donnerait une image déplorable de la jeunesse polonaise. Le cinéaste obtempère, reste derrière la caméra et s’il semble reprendre le personnage de ses précédents films, il ne lui donne aucun nom.

À l’origine, le film doit être réalisé par un autre cinéaste, pour qui Skolimowski a écrit le scénario. Cependant, celui-ci tombe malade après avoir tourné plusieurs scènes et on demande au scénariste de reprendre la réalisation du film. Mais le scénario, écrit pour un autre, ne lui convient plus du tout maintenant qu’il s’agit de son propre projet. Celui-ci est alors complètement modifié ; chaque plan est improvisé au jour le jour et le cinéaste retire de son montage toutes les scènes tournées avant son arrivée. C’est ainsi qu’on ne peut pas parler d’un récit chronologique mais plutôt d’une restitution de l’univers mental du héros ; certaines scènes sont réalistes et ancrées dans le quotidien tandis que d’autres sont étranges, irrationnelles, tout comme les décors (un homme se bat avec une voiture, on devine un fond de scène de théâtre derrière une foule…).

« De quoi s'agit-il dans La Barrière ? D'un étudiant qui décide un beau jour de rompre les amarres, et vivre sa vie intérieure selon ses élans. [..] Mais cet anarchisme romantique connaît ses limites, puisqu'il se souvient du passé, et parfois des devoirs du présent. D'où le sentiment poignant, poétique et désespéré d'une liberté absolue qu'on ne s'accorde que dans le rêve. » (Henry Chapier, Combat, 11 janvier 1967)

Film fascinant et cynique, d’une grande inventivité visuelle, La Barrière est une manifestation des préoccupations d’une jeunesse qui refuse de sacrifier sa vie aux idéaux conventionnels et aux valeurs traditionnelles.