En province, près de Dijon. Jeanne (Jeanne Moreau) est mariée à Henri Tournier (Alain Cuny), directeur du journal local, homme autoritaire absorbé par son travail. Elle s’ennuie dans leur grande propriété. Chaque mois, elle va à Paris rendre visite à son amie Maggy (Judith Magre), dont la vie animée la fascine. Par ennui ou mimétisme, elle finit par prendre un amant, Raoul Florès (José Luis de Villalonga), un champion de polo. Ses absences alertent Henri, qui lui demande d’inviter chez eux ces amis qui lui prennent tant de temps. Le jour venu, la voiture de Jeanne tombe en panne sur la route. Elle accepte l’aide d’un jeune homme, Bernard (Jean-Marc Bory), qui lui propose de la raccompagner chez elle.
« Le film se termine au petit matin, sur la route, alors que déjà l’héroïne est attaquée par une première vague d’angoisses et de regrets. L’échec est au fond de l’aventure sans doute. Mais la leçon éthique n’en est que plus forte : il faut obéir à l’amour, quoi qu’il arrive. » (Edgar Morin, 1895 n°75, printemps 2015)
Très librement adapté de Point de lendemain, un conte libertin de Vivant Denon, paru en 1777, Les Amants provoqua un grand scandale dans les milieux conservateurs et catholiques, à cause de ses images d’une rare audace érotique pour l’époque. Jusque-là, à chaque début d’étreinte, la caméra glissait vers la fenêtre ou le plafond. Louis Malle la fixe ici quelques secondes de plus, sortant du hors champ habituel la réalité d’une passion charnelle. On ne tourne pas la tête, la caméra reste avec ses personnages. Mais c’est au fond la liberté sexuelle et la liberté de choix d’une femme adultère qui pose réellement problème. Le film va contre l’ordre moral et familial : cette femme quitte tout, mari, enfant, amant officiel, pour celui qui, en une nuit, lui a fait découvrir le plaisir, le désir charnel, la passion, l’amour physique.
Louis Malle expose simplement les faits, laissant au spectateur son propre ressenti. Au départ, satire du mode de vie bourgeois, le film bascule dans la démolition de sa morale. Un propos servi par de longs plans séquences et les dialogues ciselés signés par l’écrivaine Louise de Vilmorin.
« Voici enfin un film qui peut soutenir la comparaison avec ce que nos lettres ont produit de plus raffiné au cours des âges. Et cette fois ce ne sont plus les jeunes qui vont pâlir d’envie, mais leurs aînés dont la relève est si prestement prise. Le cinéma est un art bizarre qui peut, à l’occasion, s’accommoder des sujets les plus humbles d’aspect, mais du moment qu’il entend briller sur un terrain – celui du cœur, des mœurs, de la psychologie, qu’on l’appelle comme on voudra – où les belles lettres ont cueilli tant de gloire, qu’il s’adresse, ma foi, aux spécialistes du genre, les vrais écrivains et non point à ces parias de la littérature qui se partageaient jusqu’à présent, la triste Pologne du cinéma français. » (Éric Rohmer, Arts, 12 novembre 1958)
Les Amants
France, 1958, 1h31, noir et blanc, format 2.35
Réalisation Louis Malle
Assistant réalisation Alain Cavalier
Scénario Louis Malle, librement inspiré du roman Point de lendemain de Dominique-Vivant Denon
Dialogues Louise de Vilmorin
Photo Henri Decaë
Musique Johannes Brahms
Montage Léonide Azar
Décors Bernard Evein, Jacques Saulnier
Production NEF - Nouvelles Éditions de Films
Distributeur Malavida
Interprètes Jeanne Moreau (Jeanne Tournier), Jean-Marc Bory (Bernard Dubois-Lambert), Judith Magre (Maggy Thiebault-Leroy), José Luis de Villalonga (Raoul Florès), Alain Cuny (Henri Tournier)
Présentation à la Mostra de Venise 6 septembre 1958
Sortie en France 5 novembre 1958
Sortie en salles le 9 novembre 2022 par Malavida dans une rétrospective consacrée à Louis Malle
Remerciements à Gaumont
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