Madame du Barry

Lumière Classics

À la recherche d’une jeune beauté qui pourrait remplacer la Pompadour, récemment décédée, dans le lit du roi Louis XV (André Luguet), le comte Jean du Barry (Daniel Ivernel) rencontre chez la Gourdan (Gabrielle Dorziat), célèbre entremetteuse, Jeanne Bécu (Martine Carol), qui lui semble posséder tous les atouts nécessaires.

Personnage déjà porté à l’écran par de nombreux cinéastes, notamment Ernst Lubitsch dans Passion (1919), Madame du Barry prête son nom en 1954 au film de Christian-Jaque. Après Si Versailles m’était conté… de Sacha Guitry, sorti six mois plus tôt, le château sert de nouveau d’écrin à une œuvre cinématographique. Faute de pouvoir tourner sur place, le décorateur Robert Gysreconstitue dans les studios de Joinville une immense galerie des glaces, où l’on rassemble près de trois cents figurants ; pour créer l’illusion d’une foule encore plus nombreuse, on ajoute une centaine de personnages en carton dans le fond du cadre. La critique salue les costumes, les décors somptueux et la photographie de Christian Matras, qui a su créer un jeu remarquable dans les couleurs, tantôt tamisées, tantôt chatoyantes ou acidulées.

Si l’aspect visuel du film rassemble, les très (trop ?) brillants dialogues d’Henri Jeanson déchaînent les critiques. Certains s’en amusent, d’autres déclarent qu’ils dépassent les frontières de la vulgarité. À la sortie du film, on évoque même une probable interdiction du film à l’exportation.

« Je vous ai dit l’excellence et l’homogénéité d’une interprétation dominée par André Luguet, Louis XV élégant, mélancolique et badin, Daniel Ivernel, étonnant du Barry et très grand comédien par la vigueur, l’allégresse, la sûreté de son talent, Martine Carol, exquise à voir et tellement en progrès qu’elle réussit à faire de sa du Barry-midinette un mélange de grâce, de débridé et d’insolence, Gabrielle Dorziat, enfin, inimitable maquerelle de haut vol, avec ce qu’il faut de bonhomie, de maternité, de sens des affaires et d’esprit d’intrigue. […] Au contraire d’une interdiction, c’est un "label" de qualité qu’on devrait apposer, à l’exportation, sur cette chronique sans vergogne, cette chronique de l’œil de bœuf, si joliment, si spirituellement mise en pages par Christian-Jaque, Henri Jeanson et Christian Matras. » (Simone Dubreuilh, Libération, 20 octobre 1954)