The Offence

Sidney Lumet

Dans une banlieue anglaise sordide, des adolescentes sont agressées. La ville est en émoi, la police aux aguets. Une jeune fille est découverte, terrorisée, par le sergent Johnson (Sean Connery). Suspecté, Kenneth Baxter (Ian Bannen) est arrêté mais nie tout lien avec les viols. Johnson, persuadé qu’il tient le coupable, le réinterroge seul. La confrontation, désormais plus que musclée, tourne au drame.

Quand il range en 1967 son costume d’agent 007 devenu trop encombrant, Sean Connery se promet de ne plus jamais le sortir. Mais face à l’échec de l’opus campé par son successeur George Lazenby (Au service secret de Sa Majesté, Peter Hunt, 1969), la production lui fait un pont d’or. L’acteur négocie : il tournera bien un dernier épisode (Les diamants sont éternels, Guy Hamilton, 1971) en échange de l’engagement de la United Artists de produire deux films de son choix, une adaptation de Macbeth (qui ne verra pas le jour) et celle de la pièce This Story of Yours de John Hopkins. Cette dernière, il la confie à Sidney Lumet, qu’il considère, depuis La Colline des hommes perdus, comme son mentor.

The Offence est un film d’une extrême noirceur. Flic usé, traumatisé par toute la violence croisée au cours de sa carrière, hanté par des visions sordides, Johnson est en perte de repères. Il est plein de rage, au bord de l’explosion. Son introspection mêle souvenirs et fantasmes, plus dérangeants les uns que les autres. Dans ce portrait d’un homme qui bascule, Sean Connery, à contre-emploi, excelle. Ian Bannen, le suspect, pourtant un ami proche de l’acteur, est terrifié par son jeu, hors de contrôle, au point d’en être physiquement malade. Lumet révèle un Sean Connery d’une brutalité inattendue.

Ce film inquiétant reprend les motifs du cinéma de Lumet, qui, là encore, ne juge pas son personnage, situé à la frontière entre le bien et le mal. Le cinéaste multiplie les effets justes, pour créer le malaise, filmant des lieux et un huis clos oppressants.  The Offence est une perle rare, trop méconnue. Mal distribué à l’époque (« comme un mégot qu’on jette par la fenêtre » selon Sean Connery), il ne reste que quelques jours sur les écrans américains, et ne sortira sur les écrans français qu’en 2007, juste avant la sortie de 7h58 ce samedi-là, dernier film de Lumet. Raison invoquée : la noirceur du personnage aurait desservi l’image de Sean Connery.

« On entre dans la folie de Johnson comme dans une maison hantée : les images morbides qui s’y bousculent et s’abattent violemment sur l’inspecteur comme de cinglants coups de fouet en constituent les murs infranchissables. Jonché de ces obstacles impitoyables, le film épouse une architecture impressionnante, inscrite dans l’urbanisme glauque de l’Angleterre des seventies ; son montage éclaté, fulgurant et glacial impose de façon implacable ce qui dépasse la raison. » (Amélie Dubois, Les Inrockuptibles, 11 septembre 2007)